Milot Nestor, président de l’Union Sportive de Jacmel a accordé un long entretien à haïtitempo.com au cours duquel plusieurs points ont été touchés. Découvrons cette interview exclusive avec lui.
HT: Pour commencer, pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs?
MN: Je suis Milot Nestor, président d’une association sportive bien connue sous le nom d’USJ (Union Sportive de Jacmel) existant depuis 15 ans. Je suis également professeur d’éducation physique et sportive au Centre Alcibiade Pommayrac depuis plus d’une dizaine d’années, ancien président de l’AS Sud-Est et en dernier lieu, je suis le secrétaire général de la Ligue de Basketball jacmélienne (LBJ).
HT: En fait, qu’est-ce qui vous a poussé à créer cette association (USJ) ?
MN: L’association a pris naissance dans un but bien spécifique, pallier à certain manque au sein de notre région ponctué par l’envie de transmettre un savoir. Au cours de l’année 2003, il y avait beaucoup de jeunes à Jacmel qui jouaient au tennis d’où l’idée première était de structurer ce sport en mettant sur pied un club de tennis. Deux ans plus tard, d’autres besoins se faisaient sentir dans la communauté plus précisément avec la montée en flêche du basketball dans la cité et cela nous a poussé à l’intégrer dans l’association. Et tout récemment soit en 2016, on a créé la section de volley-ball.
Je me souviens qu’en 2007, l’une de nos tenniswoman, Michelle Bellevue avait représenté le pays aux jeux scolaires caraïbéens qui se déroulaient à Porto Rico.
HT: Depuis la genèse d’USJ à cette année, êtes-vous satisfait de votre travail ?
MN: À 80%, je peux dire que mes attentes sont comblées. L’USJ c’est la volonté, la compétence, la motivation, la passion, le prix d’énormes sacrifices. On vit dans une société où les tissus sociaux sont déchirés mais le sport est un vecteur qui permettra de les recoudre. C’est un outil de rapprochement, qui permet également de tisser des liens d’amitié.
Les 20% restants, c’est parce que nous n’avons pas le soutien de l’État, un manque d’encadrement. En Haïti, le domaine sportif est traité en parent pauvre. Ce concept est mal compris chez nous. Certains pays étrangers font du sport leur priorité, ils le voient comme un vecteur de développement visant à renforcer l’économie et créer plus de travail.
HT: Dernièrement le séjour de Naomi Osaka en Haïti avait enflammé la toile, avez-vous quelques mots à ajouter sur sa venue ?
MN: Je suis tout à fait déçu. Je m’attendais à ce que la Fédération Haïtienne de Tennis (FHT) soit impliquée entièrement. Pourtant, dans des échanges que j’avais eu respectivement avec le président Junior Etienne et le vice-président Francky, ils m’ont signalé que c’est bien l’État haïtien, via le ministère des affaires étrangères et l’ambassade du Japon qui ont tout coordonné.
Encore une fois, la politique s’est saisi de la question du sport en se pointant au devant de la scène. Je pense que c’est très maladroit de la part de l’État haïtien de réclamer une portion de Naomi Osaka car la championne de l’US Open 2018 n’est pas notre produit. On n’a rien investi en cette dernière mais plutôt on fait office de “Woulibè”. Pourtant, il y a plein de jeunes bourrés de talents qui sont délaissés par les autorités du pays.
HT: À certain moment, vous étiez président de l’AS Sud-Est mais vous n’avez pas fait long feu, qu’est-ce qui s’est passé exactement?
MN: Effectivement, j’ai été président de cette formation. Mon mandat était de courte durée car après trois mois, j’avais décidé de jeter l’éponge. À cause des manipulations politiques, mon projet n’a pas pu attérir. Ainsi, je crois que l’AS Sud-Est est une perte. On sait tous que c’est une équipe communautaire mais la politique l’empêche de fonctionner correctement.
HT : Et la Ligue de Basketball de Jacmel, il y a quoi en perspective ?
MN : Au mois de décembre, on compte organiser un tournoi interscolaire avec six établissements. Vu que le basket 3×3 est très en vogue en ce moment, on en aura des compétions pour les deux catégories, masculine et féminine avec les clubs de la ville. La troisième édition du championnat interscolaire devra débuter après les festivités carnavalesques et tout comme l’année précédente, on l’organisera de concert avec le MJSAC.
HT: Merci pour cet entretien. Auriez-vous un dernier mot ?
MN : Je suis une personne très optimiste qui fait du travail son cheval de bataille. Je continuerai à former des jeunes dans les différentes disciplines sportives. Je suis disposé et disponible à alimenter des formations pour des moniteurs au cas où ils fassent appel à moi. D’une part, Je suis persuadé que si l’État haïtien investit dans le sport, dans 5 ou 10 ans, on aura des Cristiano Ronaldo, des Lionel Messi pourquoi pas des Naomi Osaka à l’haïtienne mais d’autre part, il faut jeter à la poubelle ces genres de pratiques farfelues comme la magie et appréhender la question du sport de manière rationnelle pour ne pas dire scientifique. Pour cela, il va falloir doter ce secteur de loi des cadres et les moyens nécessaires.
(Propos recueillis par Douby Jean pour haititempo.com)