Si l’Argentine, durant ces dernières années, est devenue le pays le plus exportateur d’entraineurs, il est important de savoir le secret et pour y parvenir, il faut aller chercher comment ses techniciens ont été formés. Dans cet ordre d’idées, Alcel Faugues, originaire de Mole Saint-Nicolas, est l’un de ceux qui s’installent dans le pays de Lionel Messi ; réalisant son rêve d’enfance, il veut se mettre au service de son pays. Dans cette longue interview il nous parle de sa formation, le comportement raciste des argentins et ses ambitions.
HT: Pourriez-vous vous présenter à nos fans?
AF: Salut Haiti-Tempo ! Je suis Alcel Faugues, originaire du Nord-Ouest (Mole Saint-Nicolas). Je suis né le 22 juillet 1985. Je suis marié et j’ai deux filles. Après le séisme de 2010, grâce au support de mes parents, j’ai trouvé l’opportunité d’aller en Argentine pour pouvoir réaliser ce que je veux réellement devenir et depuis quatre ans j’y travaille comme entraineur.
HT: D’où est venue l’envie d’être entraineur?
AF: C’est une longue histoire. Pour commencer, j’ai suivi un séminaire de la FHF à Port-de-Paix dirigé par Jean Berlin Hyppolite mais pour être plus précis, je faisais la classe de rhéto quand j’avais commencé à diriger “6 Hommes FC”, un club qui disputait des championnats de vacances d’été à Port-de-Paix et qui met aujourd’hui en vedette des joueurs en D1 comme le gardien du FICA Guerry Romondt, Kerby Saint-Jean et Lesly Mazard du FC Tempête. Galvanisé par mes protégés, c’était une fierté et ces expériences m’ont donné envie d’être un coach professionnel.
HT: Parlez-nous de votre formation…
AF: J’ai étudié à Rosario où est né Lionel Messi, une ville qui est le bastion du foot argentin. Ma formation a duré deux (2) ans à l’Asociación de Tecnicos del Futbol Argentino (ATFA). Mon diplôme a été validé par la FIFA en accord avec mon école. L’institution a souvent délégué des experts venus d’Europe pour faire des séminaires dans le but de compléter le cycle de formation, ce qui m’a permis d’avoir plusieurs certificats.
HT: Est-ce que vous aviez déjà envisagé de devenir entraîneur pendant votre enfance ?
AF: Bonne question! C’est plus qu’un rêve parce que depuis tout petit quand j’ai commencé à jouer, j’avais déjà eu cet esprit de leadership en moi. C’est fait ! Je peux dire oui, mes projets se concrétisent et c’est un honneur pour ma famille, mes amis et mon pays.
HT: Avez-vous été footballeur? Si oui, vous avez évolué à quel niveau?
AF: Bien sûr mais je n’ai jamais joué en championnat national. J’étais amateur.
HT: Aujourd’hui, les coachs argentins sont les plus populaires dans le monde du football, selon vous c’est quoi le secret?
AF: Il n’y a pas de secret. Je ne peux pas en dire plus sinon les argentins taffent avec beaucoup de rigueurs et leurs ateliers de travail sont basés sur la pratique.
HT: Quelles sont vos ambitions?
AF: J’ai l’envie de devenir l’un des meilleurs coachs dans le monde, diriger l’un des meilleurs clubs et aider mon pays si l’on fait appel à moi.
HT: Votre modèle?
AF: Je le dis toujours dans les medias, Diego Simeone. Je me sens un peu comme lui pour son comportement et son envie de gagner. J’aime aussi Marcelo Bielsa.
HT: Au début de cette entrevue vous nous dites que vous travaillez depuis quatre ans, quelles sont les formations que vous avez dirigées?
AF: J’ai assisté à un séminaire en 2013 que des formateurs du club espagnol Villareal ont dirigé, cela m’a donné la chance de trouver mon premier job. J’ai dirigé les enfants de 10 à 14 ans du Club Atletico Provincial (2013-15) puis j’ai entrainé pendant un an les U15 de l’Asociacion Civil Maria Reina. J’ai dû prématurément laisser mon poste après six (6) mois car j’ai trouvé un autre contrat plus important. Actuellement, je suis entraineur depuis six (6) mois des U17 du Club Union Americana, on vient à peine d’accéder en 7e division et on commence avec notre pré-saison le 23 janvier.
HT: Avez-vous déjà rencontré des difficultés particulières durant votre carrière ?
AF: Oui, la question de langue et le racisme. Dans mon premier club, quand je débutais, j’avais les mots certes mais mes explications n’ont pas été claires. Je suis haïtien, les parents des enfants ont vraiment été sceptiques et voulaient me boycotter. Heureusement j’ai réussi à m’y adapter et cela a marché comme ils le voulaient. Les U-17 comprennent mieux que les plus jeunes, ils savent si je suis par devant eux que j’en suis capable.
En Argentine, au niveau du football ce n’est pas facile de voir un étranger évoluer, là je ne parle pas des joueurs. Mon apparition a été un bang pour tous. Je me suis engagé dans une ligue où je suis le seul noir.
HT: Auriez-vous un conseil à donner à un futur entraîneur ?
AF: Croire en ses rêves, se donner à fond et s’adonner entièrement à son travail car ce n’est pas un métier facile.
HT: Vous êtes adulé par les argentins pour vos compétences, la FHF est-elle au courant de ce que vous faites?
AF: Bien sûr mais les dirigeants de la FHF m’ont pas encore parlé. J’ai accordé plusieurs interviews à des medias haïtiens comme ‘’Le Nouvelliste’’, je crois que la FHF est au courant. L’ambassadrice haïtienne en Argentine me connait, elle me félicite et a même posté une photo de moi à l’ambassade. Une fierté quand même.
HT: Pensez-vous que vos connaissances sont adéquates pour diriger une équipe nationale?
AF: Je m’attendais à cette question. Comme réponse je peux dire oui. J’ai acquis de bonnes connaissances dans l’une des meilleures écoles de Rosario. Mes formateurs venaient du vieux continent, je peux entrainer n’importe quelle équipe.
HT: Un duo Josaphat-Faugues, vous imaginez…
AF: Je regarde toujours les matchs de la sélection nationale, J’aime beaucoup Haïti. Je pense que si l’on aurait la possibilité de faire un duo, ce serait pour le bien-être du pays. Je ne suis pas la solution des problèmes du foot haïtien mais je suis l’un des éléments qui peuvent contribuer à l’avancement du sport que nous considérons comme roi.
HT: Merci d’avoir fait de cette entrevue une réussite! Un message pour nos fans…
AF: Merci ! Je sais ce que vous représentez dans le foot national. Un article écrit par Haiti-Tempo fera sans doute son chemin car vos fans sont nombreux et je suis convaincu que le message arrivera jusqu’aux oreilles des responsables. J’invite les fans à continuer à lire vos textes.
(Propos recueillis par Childo Geffrard pour haititempo.com)