Haïti-tempo a recontré ce lundi un jeune joueur polyvalent qui croit au travail et qui vise une immense carrière. Bientôt âgé de 23 ans, il a vite impressioné avec ses qualités et son sens de leadership au sein du Baltimore de Saint-Marc, ce qui lui vaut d’être nommé meilleur joueur et capitaine de la formation de la Cité Nissage Saget malgré la présence du vieux briscard, Peter Germain.
Malgré son jeune âge, Duckenson Registre est déjà une icône à Saint-Marc. Étalant toute sa classe et son talent depuis tout petit à l’Union Des Jeunes (UDJ), puis à l’équipe juvénile du Baltimore, le solide défenseur a dû jouer les durs pour arriver un cadre de l’équipe 4X4 aujourd’hui. Considéré comme le meilleur joueur du club depuis deux saisons malgré son poste, l’admirateur de Sergio Ramos est devenu cette année le capitaine de son club de coeur. Et ce n’est pas tout, il est quelqu’un qui vise le sommet. Son rêve est de jouer au plus haut niveau, de quoi être un membre de la sélection haïtienne dans le futur.
Interviewé par Haïti-Tempo, le dossard 27 du Baltimore a mis du temps à répondre à nos questions. Ses réponses vont sûrement sortir ceux qui ne le connaissaient pas encore dans le doute, car il représente déjà un véritable modèle de réussite pour les jeunes de sa ville. Découvrez l’interview complète !
HT: Salut Duckenson, bienvenue sur Haïti-Tempo. Pourriez-vous vous présenter à notre grand public ?
DR27: Salut Haïti-Tempo ! Je suis Duckenson Registre. J’évolue depuis en 2014 au Baltimore de Saint-Marc au poste de défenseur. Je suis né à Saint-Marc, j’aurai 23 ans le 1er octobre.
HT: À quel âge avez-vous débuté le football ?
DR27: C’était en 2008 à l’âge de 12 ans à l’Union Des Jeunes (UDJ). Un an après, j’étais en stage au Ranch de la Croix-des-Bouquets, ce qui m’a permis de rester en concentration avec la sélection U15. Après le seisme du 12 janvier 2010, tout a été gâché et j’avais dû retourner à l’UDJ.
HT: Parlez-nous un peu de votre parcours…
DR27: J’ai débuté dans cette école football dont je viens de mentionner ci-dessus, à l’Union Des Jeunes (UDJ), située à Portail Montrouis. À cette époque j’étais écolier mais je m’entrainais en paralèlle avec un ancien joueur du Dynamite, Eder Souverain. On m’a répéré puis j’ai eu la chance d’intégrer l’équipe de jeune du Baltimore. Et à la fin de l’année 2014, on m’a fait la licence pour évoluer avec l’équipe A. En 2015, je commençais à prendre du gallon. De là et temps, j’ai progressé et aujourd’hui je suis devenu le capitaine du club.
HT: Devenir capitaine d’un club avec 4 titres de champion national et qui compte dans ses rangs Peter Germain, une figure emblématique du foot haïtien, êtes-vous conscient de la confiance placée en vous ?
DR27: Devenir aujourd’hui capitaine d’un club avec une grande histoire en Haïti… bah… je n’ai pas les mots pour m’exprimer. Cela me fait du bien. Être le chef de file d’une équipe pareille, ça n’arrive pas à n’importe qui. De la confiance venue des dirigeants, de la direction du club, des jouers, de Peter Germain, tout cela m’a aidé à hériter du brassard. Il faut dire que ça n’arrive pas au hasard mais en raison de ma formation au sein de l’équipe, mon talent et ma discipline.
HT: Mais cette décision, le fait de vous choisir comme capitaine, elle vient de qui ?
DR27: C’est une décision qui vient des responsables de la direction. Ils estiment que durant les deux dernières saisons, je suis celui qui se donne à fond le plus sur le terrain pour ce club. Les supporters sont unanimes, je suis le meilleur joueur de l’équipe depuis deux ans et le plus discipliné. Je ne veux pas créer de jalousie (rires).
HT: Très bien. La 2e partie de la saison débute couci couça pour votre club mais jusque-là la défense est imperméable. 4 matchs disputés, aucun but encaissé, y a-t-il une raison pour expliquer cette solidité défensive ?
DR27: Depuis en pré-saison on savait qu’on allait rester solide derrière. On peut dire que la saison commence bien. Après 4 journées, on n’a pas encore encaissé. On a fait deux déplacements. C’est vraiment énorme et j’en suis fier. Il est vrai qu’on a des déchets en attaque mais en défense j’ai une bonne complicité avec les autres. Avec l’autre joueur (Sévère Vérilus) que je joue dans l’axe central, on partage le même gymnase et l’on se parle sur et en dehors du terrain. On se parle au quotidien au téléphone. Notre objectif c’est de faire l’histoire. Si cela pourrait arriver à plus de 10 matchs sans prendre de but, qu’on le fasse pour l’équipe.
HT: Dites-nous, vous jouez seulement comme défenseur central ?
DR27: Au début je commençais comme latéral droit. Mais j’étais tellement doué qu’on m’a utilisé plusieurs fois comme meneur de jeu ou en sentinelle. Mais je suis défenseur central et c’est mon poste de prédilection.
Je me rappelle une fois à Petit-Goâve, j’étais sur le banc des remplaçants. Le Baltimore avait besoin de marquer mais l’entraineur n’avait pas trop de choix. Et il m’a fait entrer comme attaquant (rires).
HT: Vous avez déjà marqué pour le club ?
DR27: Oui j’ai marqué deux fois. La première fois c’était face à Cavaly (2-2) et l’autre a été décisif puisqu’on a battu Arcahaie (1-0) au Parc Levelt.
HT: Gaucher ou droitier ?
DR27: Droitier.
HT: Et c’est quoi l’objectif du club pour cette 2e tranche de la saison ?
DR27: Notre objectif est le même que toute autre équipe, c’est de remporter le championnat, mais avant tout on veut terminer en première ou deuxième position au classement. Après on va se donner aux play-offs pour essayer d’offrir le titre au Baltimore. Cela fait des années qu’on ne l’a pas fait. Moi, je n’ai pas encore ce trophée dans mon palmarès, idem pour beaucoup d’autres membres de l’équipe, car on a un groupe jeune.
HT: Vous venez d’enregister votre première victoire à domicile depuis le 24 avril. C’est vraiment bizzare. Dites-nous, y a-t-il une bonne entente entre les joueurs et le staff technique ?
DR27: Une très très très bonne relation. Que ce soit dans les rues, sur le terrain, à l’entrainement ou au téléphone. Il n’y a pas d’hypocrisie parmi nous, avant le début de la compétition on s’est attardé dessus. On est vraiment cool. Quand il faut faire des blagues on le fait, quand il s’agit de passer à l’action on est sérieux. Ça fait des mois qu’on n’arrivait pas à gagner à domicile, on renoue avec la victoire, on va essayer de continuer sur cette lancée.
HT: Qui met l’ambiance dans les vestiaires ?
DR27: Parfois c’est moi ou Peter Germain. Mais c’est toujours un type qu’on appelle Zagallo. Son nom est Durand Anderson.
HT: Hormis le Baltinore et votre carrière de footballeur, avez-vous d’autres activités ?
DR27: À part du foot, j’ai d’autres intérets. Je suis superviseur d’une compagnie bien que je n’aie pas encore commencé à y travailler. Après, j’ai suivi des cours comme l’anglais et l’informatique. Vous le savez, en Haïti on ne peut pas miser vraiment sur le foot. Il faut toujours apprendre quelque chose pour demain.
HT: Comment réussissez-vous à concilier tout cela et votre carrière sportive ?
DR27: Tout le monde sait que je joue au foot. Il y a une façon de gérer ça. On apprécie mon dévouement et ma sagesse parce qu’il y a beaucoup de joueurs qui ne partent pas à la quête du savoir.
HT: Beaucoup de joueurs ont un modèle. Quel sportif vous inspire ?
DR27: Quand j’étais plus jeune, il y avait un défenseur uruguayen qui s’appelle Diego Lugano. Je l’aimais et mes coéquipiers m’appellaient Lugano. Après avoir compris mieux le jeu, je suis tombé sous le charme de Thiago Silva mais je n’aime pas vraiment son tempérament.
S’il y a maintenant un défenseur qui m’inspire, il n’est autre que Sergio Ramos. J’aime bien sa technique et son caractère. En Haïti je choisis sans doute Jude Saint-Louis.
HT: Vous avez déjà été expulsé ?
DR27: Oui, deux fois.
HT: Est-ce que vous auriez des conseils à donner aux jeunes de Saint-Marc et aux Haïtiens en général qui rêvent de faire du foot et n’osent se lancer ?
DR27: Je suis déjà un exemple pour les jeunes Saint-marcois. Il faut respecter tout le monde, les joueurs, dirigeants et supporters, entrainer et avoir de la discipline. Croyez en Dieu et en vous malgré les critiques, bien fixez vos objectifs malgré les obstacles !
Ne vous prend pas pour Cristiano Ronaldo si vous marquez un but. Travaillez davantage, à 200%, pour en marquer d’autres.
HT: Et vous, quel est le meilleur conseil qu’on vous ait donné ?
DR27: On m’a dit de croire en moi et de travailler puisqu’il y en avait qui ont vécu pire que moi.
Ces gens avaient vraiment raison parce qu’à ce moment-là j’avais fait face à beaucoup de problèmes. Certaines personnes m’ont conseillé de partir mais je me suis dit s’il y a un endroit pour relever un défi c’est au Baltimore.
Aujourd’hui je suis devenu capitaine du club et c’est grâce aux conseils positifs que j’ai reçus. Je n’ai pas encore atteint le niveau souhaité, je rêve du plus haut niveau et de représenter mon pays.
HT: Et si l’on vous demande quel est votre rêve ?
DR27: Je viens de le dire. C’est de jouer à l’étranger, en France, Espagne, Italie, USA, Chine etc.
C’est de surtout représenter Haïti.
J’aimerais bien un jour, quand la rédaction d’Haïti-Tempo aura à écrire un article sur moi, qu’elle parle de l’international haïtien.
HT: Pire et meilleur moment dans votre carrière…
DR27: Le pire souvenir c’était face au Racing Club Haïtien. Le match allait se jouer en dimanche mais en mardi ma mère était hospitalisée. J’ai raté plusieurs séances d’entrainement. 3 jours avant la rencontre, Alain Vubert était venu me parler. Il m’a dit s’il était à ma place qu’il ne jouerait pas, car le football demande un bon mental.
J’avais vraiment envie de jouer. Arrivé sur le terrain, j’ai fait une erreur et on enncaisse un but qui nous faisait perdre ce match.
Le meilleur moment c’est le fait que depuis deux ans je suis le meilleur joueur du Baltimore.
HT: Un message pour vos fans, les lecteurs et internautes d’Haïti-Tempo…
DR27: Il faut toujours supporter les joueurs. On a vraiment besoin de cela. Merci à Haïti-Tempo, car vous faites un gros travail !