Transféré à l’Etnikos Achna en janvier, Kervens Fils Belfort a marqué dimanche dernier son premier but avec ce club lors de la 23e journée de la D1 Chypriote, il est bien placé après plus de 2 mois dans ce pays pour faire la différence entre ce championnat et celui de la France où il a évolué pendant plus d’un an.
Meilleur buteur en activité de la sélection nationale haïtienne avec 11 buts, Belfort parle aussi de la prochaine confrontation des Grenadiers contre la Chine le 27 mars prochain en amical, un match qu’il espère sortir le grand jeu pour augmenter ses chiffres en sélection et son avis sur la problématique du football haïtien.
Voici notre interview avec lui:
HT : Kervens, quelle fut votre réaction après votre premier but avec votre nouveau club l’Etnikos Achna?
KB : J’avais pris le lieu où mon entraineur s’était tenu parce que depuis mon arrivé, il m’a fait beaucoup de confiance, j’attendais ce but afin de le récompenser. Durant mes 7 matches avec l’Etnikos Achna, j’ai toujours été l’un des éléments importants mais, je n’avais pas encore trouvé le chemin des filets, j’espère que ça va être le déclic.
HT : Quelle différence faites-vous entre le championnat Chypriote et d’autres championnats où vous avez eu la chance d’évoluer ?
KB : La différence c’est que les Chypriotes donnent beaucoup de temps aux joueurs venus d’ailleurs pour s’adapter ce qui est différent de la France. Je me sens heureux dans une famille qui est différente à celle de Fréjus. En plus de tout cela, le championnat Chypriote est beaucoup plus physique que celui de la France.
HT : Vous avez eu la bénédiction de Marc Collat pour jouer en amical contre la Chine le 27 mars prochain, qu’est-ce que le grand public haïtien peut espérer de vous ?
KB : Le public le sait déjà, quand Belfort porte le maillot de la sélection haïtienne, la réponse est claire et les chiffres ont dit tout, sur mes 6 derniers matches j’ai marqué 5 buts et j’ai déjà inscrit 11 buts au total pour les Grenadiers, j’aimerais que ces chiffres augmentent tout en espérant un grand match de l’équipe entière.
HT : Vous êtes l’un des joueurs haïtiens très patriotiques, cela se voit à travers vos messages et vos images projetées, le fait de représenter Haïti sur un terrain de football, cela signifie quoi pour vous ?
KB : C’est une motivation naturelle quand je porte le maillot des grenadiers, c’est ma famille et toute une colonie haïtienne qui se trouve à travers le monde que je défends. Je défends un pays qui veut de la stabilité, de la paix. La seule façon de les faire passer c’est lorsque je me trouve sur un terrain de foot avec un ballon.
HT : Selon vous, quelle est la cause fondamentale de la régression du football haïtien à celui d’autre pays issus de la Caraïbes ?
KB : Dans les autres pays, l’état et le secteur privé donnent beaucoup d’importance aux sports ce qui est différent dans notre pays et qui affecte le sport. La République Dominicaine a un plus grand budget disponible au sport que nous, cela ne va pas m’étonner si un jour les dominicains nous devancent parce que nos dirigeant actuels ne croient plus au football.
HT : Vous pensez que l’état et le secteur privé qui n’ont pas apporté leur contribution peuvent décourager nos athlètes et même hypothéquer nos résultats ?
KB : Bien sûr que oui, les jeunes haïtiens sont découragés à cause de ça. Imaginez-vous, une équipe de foot en Haïti ne peut même acheter de l’eau pour ses joueurs pour des entrainements, n’en parle pas pour un salaire alors qu’ils ont une famille pour aider et des enfants pour envoyer à l’école. Cela les a découragés et les a poussés à rester aux Etats Unis quand ils ont trouvé un visa. « Twòp malere fè ekip Ayiti. »
HT : Donc, vous souhaitez voir des grands investisseurs dans le football Haïtien!
KB : Ah oui. C’est ça le football. Mais ils ne voulaient pas investir parce qu’ils n’auront rien en retour.
HT : Ne pensez-vous pas que les joueurs devraient lever le niveau afin d’attirer les investisseurs?
KB : Vous parlez du niveau, comment voulez-vous qu’un joueur le fasse sans avoir un encadrement sportif ? A moins qu’il fasse un sacrifice. Tout le monde n’a pas la même motivation. Moi, Jeff Louis, Tiga et Donald Guerrier l’en avaient mais, vous n’allez pas trouver ça tout le temps et c’est comme ça sur chaque 50 talents que nous avons, nous en avons perdu 45.
HT : De nos jours, les gens ne s’intéressent plus au championnat national de D1 parce qu’ils peuvent rester chez eux pour regarder les grosses écuries européennes. Pour attirer ces gens-là, qu’est-ce qu’il faut faire ?
KB : Avant, on doit régler le problème d’insécurité au niveau de la capitale, les gens ne se déplacent pas en raison de ce problème et ceci est tellement clair, dans les zones provinciales du pays, les stades sont toujours bien remplis.
HT : Pourtant les activités musicales comme les soirées dansantes et les festivités carnavalesques ont toujours eu le support des commanditaires et l’attention du public. Pourquoi pas le sport alors qu’on dit souvent que le sport et la musique sont dans nos veines?
KB : C’est la faute de nos dirigeant. Imaginez-vous que la Gold Cup est proche, les autres pays ont déjà mis un budget disposé par l’état. En Haïti, il y a un budget quand il y a le carnaval. Une sélection qui fait flotter notre bicolore partout où elle est, on nous a traité de très mauvaise manière. ‘’Se BonDye ki fè majorite nan nou ap jwe deyò si se pat sa pa tap gen seleksyon ayisyen.’’
HT : Un dernier mot pour finir ?
KB : Je veux que les dirigeants prennent leurs responsabilités. Nos athlètes n’ont pas eu d’encouragement du côté de l’état et du secteur privé. On est tous Haïti, quand on a pris un échec c’est tout un pays qui est honte. Il faut donner de l’importance aux artistes haïtiens, je parle dans tous les domaines.
(Interview réalisée par Benson Petit-Clair pour Haititempo.com)