Par Douby Jean
La sélection haïtienne de football a réalisé un parcours d’anthologie qui mérite bien un détour. Que ce soit la presse locale ou internationale, elles ont été stupéfaites des diverses prestations des Grenadiers. Le capitaine Johny Placide a fait le point sur les prouesses de sa nation dans la Gold Cup 2019 au micro de France TV SPORT.
Avant que ne débute la Coupe d’Or, Marc Collat était sous le feu des critiques pour avoir retenu Johny Placide dans la liste définitive. Au final, le technicien français a eu gain de cause de ces gens-là grâce aux superbes performances du dernier rempart haïtien. Deux fois consécutifs à savoir contre le Canada et le Mexique, le dossard 1 des Grenadiers a signé l’arrêt du match et on retiendra surtout le grand effort qu’il avait déployé pour faire échec au Mexicain Andres Guardado.
Revenant sur la participation du onze national à la Gold Cup, Placide se retrouve entre joie et frustration notamment avec ce pénalty inventé qui avait poussé Haïti vers la sortie : “Il y a un petit peu des deux, il y a la joie d’avoir fait ce parcours là. Et la frustration d’avoir perdu en demi-finale, surtout avec ce penalty malheureux et discutable. C’est ça qui est frustrant.”
Le technicien français était fier de ses poulains mais déçu de la façon dont les choses se terminent selon Placide: “Il était très content de nous. C’est vrai qu’on a un peu marqué l’histoire du football haïtien. Haïti ne s’était jamais retrouvée en demi-finale. Il nous a félicité de notre travail et de notre compétition. Lui aussi était un peu frustré de la physionomie du match. Même si on a été dominé par cette équipe mexicaine, on a été solide défensivement. Tout le groupe se voyait aller terminer cette demie aux tirs au but et malheureusement ça s’est décidé autrement. Mais le bilan global était très positif,” a relaté le dernier rempart des bleu et rouge.
L’objectif des Grenadiers était de prendre l’une des deux premières places de leur groupe. Puisque l’appétit en mangeant, à chaque étape sautée, ils voulaient aller encore plus loin : “On s’était fixé l’objectif de rejoindre cette phase finale, donc de terminer dans les deux premiers de la poule. Le reste, ce n’était que du bonus. Au fil de la compétition, vue nos prestations et le visage qu’on a montré pendant les matchs, plus on passait les tours, plus on espérait davantage. On n’avait pas fixé une place. On voulait prendre des points dès les premiers matchs. Les Bermudes, c’était leur première compétition donc on savait que ne pas prendre des points face à eux, ça allait être compliqué. Le Nicaragua, on les connait bien, mais il fallait confirmer. Avec deux victoires avant de jouer le Costa Rica, on savait que c’était un match bonus. On avait à cœur de faire un résultat parce qu’on rencontrait le Mexique dès les quarts en terminant deuxièmes. Donc on a tout donné et ça nous a réussi. Même si on a été mené 1-0, on a réussi à faire pencher la balance.”
Questionné sur le match qui l’a marqué durant ce parcours exceptionnel, il s’est attardé sur le quart de finale face au Canada : “Le quart de finale contre le Canada. Perdre 2-0 à la mi-temps et revenir à 3-2, personne n’aurait mis une pièce sur nous. Ce match-là, c’était vraiment un moment inoubliable. Même nous, à la mi-temps, on se disait que ça allait être compliqué. C’était un moment magnifique. Il y a aussi le match à New-York (contre le Costa Rica, ndlr), avec une grosse communauté haïtienne. Un stade plein à 80% et quasiment avec des Haïtiens. C’était un moment énorme.”
Haïti a claqué 9 buts en 4 matchs et pour Placide, il n’y a rien d’étonnant à cela : “C’est une de nos forces. On a des joueurs avec les qualités pour faire la différence. On a de la vitesse, notre force ce sont les attaques rapides et ça nous a réussi à la Gold Cup. Dans les autres compétitions, on a beaucoup marqué de la même façon et on s’est appuyé sur ça.”
Depuis des années, c’est Johny Placide qui porte le brassard, mais pour la Gold Cup c’était quelque chose de spéciale : “Capitaine, en soi ce n’était pas tellement particulier. Je suis capitaine depuis pas mal d’années. Mais là c’est une aventure. Avant la compétition, on a eu beaucoup d’absents. Kevin Lafrance, qui venait de signer à l’APOEL FC, n’est pas venu parce que son équipe prépare la Ligue des champions. Kevin, c’était une pièce-maîtresse de notre effectif. On a eu un problème avec Ricardo Adé, un défenseur central qui joue au Chili, qui n’a pas eu de visa et ne pouvait pas entrer aux Etats-Unis. Il n’a pu jouer que contre les Bermudes parce que le match était au Costa Rica. Ensuite, on a eu la blessure de Mechack Jérôme, notre deuxième capitaine. Et avant, on a eu la blessure de Soni Mustivar. On a eu quatre titulaires potentiels absents donc avant la compétition, on avait un peu de doutes. Parce qu’on sait que le onze de départ c’est très important. On a fait avec ceux qui restaient et ça a très très bien marché. Même par rapport aux doutes qu’on avait, les gens savaient qu’on pouvait se qualifier. On reste une équipe assez forte. Le Canada et le Mexique s’attendaient à un match difficile et c’est ce qui est arrivé.”
Entre ses débuts en sélection et le moment présent, Placide parle d’une grande amélioration : “Bien sûr. Je suis arrivé en sélection il y a huit, neuf ans, c’est le jour et la nuit. On n’avait pas de sponsor, au niveau de l’organisation c’était très compliqué. Aujourd’hui, on a les équipements comme toutes les grosses sélections, que ce soit médical, dans la composition du staff avec un préparateur physique, un entraîneur des gardiens, les coup de pieds arrêtés pour cette compétition. La fédération a fait de gros efforts. Si on a une équipe cohérente on peut faire de grandes choses. Il y a encore des choses à améliorer, mais par rapport à quelques années en arrière c’est un grand pas vers l’avant.”
Depuis son départ d’Oldham, il est sans club et cette Gold Cup a été l’occasion pour lui de montrer ses capacités : “Cela n’a pas été gênant, au contraire. J’ai eu la chance de m’entraîner quasiment toute la saison avec mon club formateur du Havre, avec le programme d’un joueur professionnel. Et c’est une chance aussi cette Gold Cup, parce qu’elle arrive juste avant la reprise des clubs pros et ça m’a permis de montrer que je n’avais pas perdu mes capacités.”
Haïti a quitté la Gold Cup au stade des demi-finales suite à un revers sur la plus courte des marges (0-1) face au Mexique.